Scoutisme de Baden-Powell |
Ô liane, fleur, grande herbe des bois, Cache, couvre, mure, afin qu'on oublie L'odeur, le contact, la vue et la voix De leur race haïe! Cendre grasse et noire, autel découvert, C'est la pluie aux pieds blancs qui danse. La biche met bas au sillon désert, Nul n'en viendra plus troubler le silence; Le mur sans nom s'effrite, aveugle, flanc ouvert, Dont nul n'habitera jamais plus le silence! |
Vous devez vous rappeler que Mowgli, après avoir cloué la peau de Shere Khan au Rocher du Conseil, déclara aux loups du Clan de Seeonee demeurés près de lui que, dorénavant, il chasserait seul dans la Jungle; et les quatre enfants de Mère Louve et Père Loup dirent qu'ils chasseraient avec lui. Mais ce n'est pas chose facile de changer sa vie du jour au lendemain, surtout dans la Jungle. La première chose que fit Mowgli, quand les membres du Clan désorganisé se furent esquivés, fut de gagner la caverne de ses frères, et d'y dormir un jour et une nuit. Puis il entreprit de raconter à Mère Louve et à Père Loup tout ce qu'ils pouvaient comprendre de ses aventures parmi les hommes; et, lorsqu'il fit jouer dans le soleil du matin la lame de son couteau (le même qui avait servi à écorcher Shere Khan), ils convinrent qu'il avait appris quelque chose. C'est alors qu'Akela et Frère Gris durent expliquer la part qu'ils avaient prise à la grande conduite des buffles dans le ravin; et Baloo monta cahin-caha la colline pour entendre toute l'histoire, tandis que Bagheera se grattait de plaisir des pieds à la tête en voyant de quelle façon Mowgli avait mené sa campagne.
Le soleil était déjà haut dans le ciel, et personne ne songeait à dormir. De temps en temps Mère Louve levait son nez pour renifler avec satisfaction une bonne prise d'air, lorsque le vent lui apportait l'odeur de la peau de tigre étendue sur le Rocher du Conseil.
Baloo et Bagheera firent écho.
Mowgli, la tête sur l'épaule de Mère Louve, dit avec un sourire heureux que, pour sa part, il souhaitait de ne jamais plus voir, entendre ou sentir l'Homme de nouveau.
Il s'était souvent amusé à jeter des fruits mûrs de pawpaws dans les nids de frelons, quitte à courir à la mare la plus proche avant que les frelons pussent l'attraper.
Le temps à peine de ramasser sa patte, et le couteau se fichait profondément en terre juste au-dessous. Mowgli avait frappé si lestement que nul oeil humain ordinaire n'eût pu suivre son geste. Mais Akela était un loup; or, le chien lui-même, si dégénéré du loup, son ancêtre sauvage, s'éveille à temps du plus profond sommeil au contact d'une roue de charrette à son flanc, et, avant que la roue soit sur lui, s'est mis, d'un bond, hors de danger.
Bagheera sauta sur ses pattes, leva la tête de toute la longueur de son cou, renifla, et chaque courbe de son corps sembla se figer. Frère Gris suivit lestement son exemple, en se tenant un peu sur la gauche pour prendre le vent qui venait de droite, tandis qu'Akela, en trois bonds, remontait le vent de cinquante mètres, et, à demi tapi sur le sol, tombait aussi en arrêt. Mowgli les regardait avec envie. Il connaissait les choses à l'odorat comme peu d'êtres humains l'auraient pu faire, mais il n'atteignait pas à cette délicatesse d'un nez de la Jungle, aussi fine qu'une détente de gâchette à un cheveu près; et ses trois mois dans le village enfumé l'avaient mis déplorablement en retard. Cependant, il mouilla son doigt, le frotta sur son nez, et se dressa, cherchant à prendre le vent le plus haut, le plus faible peut-être, mais le plus sûr.
Ce n'avait été qu'une éclaboussure de lumière, pendant une fraction de seconde, sur les montures de cuivre du vieux mousquet; mais rien, dans la Jungle, n'a proprement ce clignement d'éclair, sauf lorsque les nuages se poursuivent dans le ciel. Alors un éclat de mica, la moindre flaque d'eau, ou même une feuille d'arbre plus vernie, flamboieront comme un héliographe. Or, ce jour-là, il n'y avait pas de nuages ni de vent.
Les quatre frères de Mowgli ne dirent rien, mais disparurent en rampant et semblèrent se fondre parmi les ronces et les broussailles vers le bas de la colline.
Élevant la voix, elle ajouta :
Mowgli promenait son regard de l'un à l'autre de ses amis, la poitrine gonflée et les yeux pleins de larmes. Il fit un pas en avant, et, tombant sur un genou :
Ils le regardèrent avec malaise; puis, comme leurs yeux fuyaient les siens, il les provoqua de la voix, les rappelant et rappelant encore, jusqu'à ce que sur leur corps tout leur poil se hérissât et qu'ils tremblassent de tous leurs membres, tandis qu'il les fixait de plus en plus tenacement :
Et il lécha le pied de Mowgli.
Et tous quatre suivirent sur ses talons, la queue entre les jambes.
Le vieil Ours ne dit rien, mais il n'en pensait pas moins.
Mowgli coupa sans bruit à travers la Jungle comme pour tomber à angle droit sur le chemin de Buldeo, jusqu'au moment où, écartant la brousse, il vit le vieil homme, son mousquet sur l'épaule, qui remontait au petit trot la trace de l'avant-veille.
Vous vous rappelez sans doute qu'en quittant le village, Mowgli portait sur ses épaules la lourde peau saignante de Shere Khan, pendant qu'Akela et Frère Gris trottaient derrière; la piste était donc des plus nettement marquée. En ce moment Buldeo arrivait à l'endroit où Akela était retourné, comme vous le savez, et l'avait brouillée à dessein. Alors, il s'assit, toussa et bougonna; puis il poussa de petites pointes et tourna dans la Jungle, cherchant à relever la trace; et, tout ce temps-là, il était à un jet de pierre de ceux qui l'épiaient. Personne ne fait moins de bruit qu'un loup lorsqu'il ne se soucie pas d'être entendu; et, quant à Mowgli, bien que, de l'avis des loups, il se mût comme un lourdaud, il pouvait aller et venir plus léger qu'une ombre.
Ils cernaient le vieil homme, comme une bande de marsouins un steamer à toute vitesse; et, ce faisant, ils ne se gênaient pas pour causer, car le diapason de leur langage vibrait au-dessous des sons les plus bas que, sans habitude, un être humain puisse entendre. À l'autre extrémité de la gamme, c'est le cri aigu de Mang, la Chauve-Souris, que beaucoup de gens ne peuvent percevoir : de là part l'échelle des sons qui servent de langage à tous les oiseaux, chauves-souris et insectes.
Buldeo grommelait quelque chose d'un air féroce. Mowgli traduisit :
Et les traqueurs silencieux virent le bonhomme bourrer une pipe à eau, l'allumer et en tirer une bouffée; et ils prirent note de l'odeur du tabac pour être sûrs de reconnaître Buldeo, le cas échéant, par la nuit la plus noire.
Un petit groupe de charbonniers descendit alors le sentier et fit halte, naturellement, pour parler à Buldeo dont la renommée, comme chasseur, s'étendait à vingt milles à la ronde. Ils s'assirent tous pour fumer, tandis que Bagheera et les autres venaient tout près au guet, et que Buldeo se mettait à raconter d'un bout à l'autre l'histoire de Mowgli, l'Enfant-Démon, avec force embellissements et inventions : comment c'était lui, Buldeo, qui avait réellement tué Shere Khan; comment Mowgli s'était changé en loup et avait lutté avec lui tout l'après-midi, puis avait repris sa forme de garçon et ensorcelé le fusil de Buldeo de façon que la balle déviât, lorsqu'il avait visé Mowgli, et allât tuer un de ses propres buffles; comment enfin le village, le connaissant pour le chasseur le plus brave de Seeonee, l'avait envoyé pour tuer cet Enfant-Démon. Mais pendant ce temps-là le village avait empoigné Messua et son mari, qui étaient sans aucun doute le père et la mère de cet Enfant-Démon, et les avait barricadés dans leur propre hutte. On ne tarderait pas à les soumettre à la torture pour leur faire avouer qu'ils étaient sorcier et sorcière, et alors on les brûlerait vifs.
Buldeo répondit qu'on ne ferait rien avant son retour, le village désirant qu'il commençât par tuer l'Enfant de Jungle. Cela fait on disposerait de Messua et de son mari, et le village se partagerait leurs terres et leurs buffles. Et les buffles du mari de Messua étaient même remarquablement beaux. C'était faire oeuvre pie, pensait Buldeo, que de détruire les sorciers; et des gens qui recevaient chez eux ces Enfants-Loups échappés de la Jungle appartenaient clairement à la pire espèce de sorciers
Mais, disaient les charbonniers, qu'arriverait-il si les Anglais entendaient parler de cela? Les Anglais, leur avait-on dit, étaient des gens absolument fous, qui ne laisseraient pas d'honnêtes fermiers tuer leurs sorciers en paix.
Éh bien, quoi! disait Buldeo, le chef du village raconterait que Messua et son mari étaient morts de la dent d'un serpent. Tout était arrangé, la seule chose à faire maintenant était de tuer l'Enfant-Loup. N'avaient-ils pas rencontré, par hasard, quelque chose d'approchant?
Les charbonniers jetèrent autour d'eux des regards circonspects, et remercièrent leur bonne étoile de n'avoir rien rencontré de pareil; mais ils ne doutaient pas qu'un homme aussi brave que Buldeo ne pût le découvrir, si cela était au pouvoir d'hommes au monde. Le soleil baissait déjà et ils avaient quelque idée de pousser jusqu'au village de Buldeo pour voir la méchante sorcière. Buldeo répondit que sans doute c'était son devoir de tuer l'Enfant-Démon, mais qu'il ne pouvait songer à laisser, sans les escorter, des gens désarmés traverser une Jungle d'où pouvait à chaque instant surgir le Loup-Diable. En conséquence, il les accompagnerait, et si l'Enfant des sorciers apparaissait, eh bien! il leur montrerait comment le meilleur chasseur de Seeonee traitait de pareils monstres. Le brahmane, affirmait-il, lui avait donné contre la créature un charme qui garantissait de tout accident.
Et Mowgli traduisait, jusqu'à la partie de l'histoire un peu trop difficile pour lui, concernant les sorciers alors, il dit que l'homme et la femme qui avaient été si bons à son égard étaient pris dans une trappe.
Mowgli réfléchit profondément, les doigts jouant avec le manche de son couteau, tandis que Buldeo et les charbonniers s'éloignaient très vaillamment en file indienne.
Frère Gris montra ses dents blanches avec une moue de mépris.
Elle baissa la tête pour donner au son toute sa portée et poussa un long, long « bonne chasse » un appel de minuit en plein jour, très suffisamment redoutxt2 pour commencer. Mowgli l'entendit rouler, monter, retomber et s'éteindre derrière lui en une sorte de plainte à faire froid dans le dos, et se mit à rire tout seul en courant à travers la Jungle.
Il pouvait voir les charbonniers serrés en peloton, tandis que le canon du fusil de Buldeo oscillait, comme une feuille de bananier, aux quatre points cardinaux. Frère Gris, alors, lança le Yalahi! Yalaha! l'appel de la chasse au chevreuil, lorsque le Clan court le Nilghai, la grosse vache bleue, et cela semblait s'élever des confins de la terre, se rapprochait, se rapprochait, pour finir en un cri déchirant coupé net. Les trois autres répondirent, si bien que Mowgli même eût juré que le Clan tout entier donnait à pleine gorge; puis tous à la fois entonnèrent la magnifique Chanson du Matin dans la Jungle, sans omettre une des variations, des fioritures et des notes d'agrément que sait moduler la voix bien timbrée d'un vrai loup du Clan. En voici une interprétation grossière, mais il faut en imaginer l'effet lorsqu'elle rompt le silence de l'après-midi dans la Jungle :
Tout à l'heure encor l'ombre de nos corps Ne tachait pas la plaine : Maintenant chacun, un spectre importun Au gîte nous ramène. Sur l'azur de l'air, dressé net et clair, Branche ou roc détache son angle! Nous entendez-vous : Bon sommeil à tous Qui gardez la Loi de la Jungle! Plume et poil soudain, loup, vautour ou daim, Fondent dans les lisières; En silence vois les Barons du Bois Regagner leurs tanières. Lourd sous le joug neuf, par les champs le boeuf Peine, le sillon fume; Redoutable et nu, le matin venu Flambe sur l'étang qui s'allume. Au gîte! il est temps. Le ciel rutilant Blanchit l'herbe bavarde, Et murmurant sous les jeunes bambous Glissent les mots de garde. Les yeux clignotants, nous battons les champs, Ecoutant d'où nous sommes, Au fond des roseaux, les sarcelles d'eau Chanter : le Jour le Jour aux Hommes! Dans les chemins creux, à nos flancs poudreux A séché la rosée. Où nous avons bu, la berge n'est plus Qu'une fange crispée : Car le traître soir livre et laisse voir Chaque empreinte de griffe ou d'ongle; Nous entendez-vous : Bon sommeil à tous Qui gardez la Loi de la Jungle! |
Mais aucune traduction n'en peut rendre l'effet, ni le glapissement de mépris dont les Quatre en soulignaient chaque note au craquement des branches dans les arbres, comme les hommes y grimpaient en hâte, et comme Buldeo commençait à répéter des formules d'incantations et de magie. Ensuite les frères se couchèrent pour dormir; car pareils à tout ceux qui n'ont à compter, pour vivre, que sur leur propre effort, ils étaient d'esprit méthodique; et personne ne travaille bien sans sommeil.
Entre-temps Mowgli dévorait les milles, à raison de neuf à l'heure, d'un trot preste et cadencé, heureux de se retrouver en forme après tant de longs mois à l'étroit parmi les hommes. Sa première idée était de tirer Messua et son mari de la trappe. Plus tard, se promit-il, il commencerait à payer ses dettes au village, et largement.
C'est à la lueur du crépuscule qu'il revit les pâturages bien connus, et le dhâk sous lequel Frère Gris l'avait attendu le matin du jour où il tua Shere Khan. Tout irrité qu'il fût contre la race entière des hommes et leur société, quelque chose lui serra la gorge et son souffle s'arrêta quand il aperçut les toits du village. Il remarqua que tout le monde était rentré des champs plus tôt que d'habitude, et qu'au lieu d'aller préparer leur repas du soir ils formaient un rassemblement sous l'arbre de la place, bavardant et criant.
Il se coula le long de la partie extérieure du mur, jusqu'à la hutte de Messua, et regarda par la fenêtre dans la chambre. Messua gisait, bâillonnée, pieds et mains liés, la poitrine oppressée, et poussant de sourds gémissements; son mari était attaché au bois du lit peinturluré. La porte de la hutte, qui ouvrait sur la rue, était hermétiquement fermée, et trois ou quatre individus, assis devant, s'y tenaient le dos appuyé.
Mowgli connaissait fort bien les us et coutumes des villageois. Sa raison lui démontrait que tant qu'ils seraient en train de manger, de causer et de fumer, ils ne penseraient pas à faire autre chose, mais que, aussitôt repus, ils commenceraient à devenir dangereux. Buldeo serait de retour avant longtemps, et si son escorte avait fait son devoir, il aurait une histoire des plus intéressantes à raconter. Sur quoi il pénétra dans la hutte par la fenêtre, et, se penchant sur l'homme et sur la femme, il coupa leurs liens, les débarrassa de leurs bâillons, puis regarda autour de lui s'il n'y avait pas un peu de lait.
Messua était à moitié folle de souffrance et de peur (on l'avait battue et lapidée toute la matinée), et Mowgli n'eut que le temps de lui mettre la main sur la bouche pour étouffer son cri. Son mari n'était qu'abasourdi et furieux il restait assis à enlever la poussière et les débris de toutes sortes de sa barbe à demi arrachée.
Et elle pressa Mowgli sur son coeur. Jusqu'alors Mowgli n'avait rien perdu de son sang-froid; mais à ce moment il se mit, ce qui le surprit très fort, à trembler de la tête aux pieds.
Messua ne dit rien, mais c'étaient ses blessures, à elle, que regardait Mowgli, et ils entendirent ses dents grincer lorsqu'il aperçut le sang.
L'Homme leva un regard lugubre sous ses sourcils; mais Messua se prit à rire :
Il leva la tête et prêta l'oreille à des cris et des piétinements au-dehors.
Il bondit par la fenêtre et longea de nouveau en courant le mur du village jusqu'à portée d'oreille de la foule rassemblée sous le pipal. Buldeo, couché sur le sol, toussait et gémissait, pendant que chacun lui posait des questions. Les cheveux tombés sur les épaules, les pieds et les jambes écorchés d'avoir grimpé aux arbres, il pouvait à peine parler; mais il sentait vivement l'importance de sa situation. De temps en temps il disait quelque chose au sujet de diables, de chansons de diables et d'enchantements magiques, juste de quoi donner à la foule un avant-goût de ce qui allait suivre. Puis il demanda de l'eau.
Il secoua sa torpeur et se glissa de nouveau jusqu'à la hutte. Au moment où il atteignait la fenêtre, il sentit qu'on lui touchait le pied.
Mère Louve se dressa sur ses pattes de derrière et regarda par la fenêtre dans l'obscurité de la hutte. Au bout d'une minute elle retomba sans bruit sur ses pattes, et tout ce qu'elle dit fut :
Le mari de Messua, à quatre pattes, était en train de creuser la terre dans un coin de la hutte.
L'Homme le fixa d'un oeil courroucé :
Le mari se releva et noua les dernières roupies dans sa ceinture. Mowgli aida Messua à franchir la fenêtre, et l'air frais de la nuit la raviva un peu. Mais la Jungle, à la lueur des étoiles, semblait aussi sombre que terrible.
Ils firent signe que oui.
Quant à Messua, elle regarda Mowgli et sourit.
Il se retourna vers Messua avec vivacité :
Messua se jeta en sanglotant aux pieds de Mowgli, mais il la releva vivement avec un frisson. Alors elle se pendit à son cou en lui donnant tous les noms de tendresse et de bénédiction qu'elle pouvait retrouver, pendant que son mari, couvrant ses propres champs d'un regard d'envie, disait :
Mowgli se prit à rire :
Ils s'éloignèrent du côté de la Jungle, et Mère Louve bondit hors de sa cachette.
Long et grave un hurlement s'éleva, puis retomba, et Mowgli vit le mari de Messua hésiter et se retourner, prêt à courir pour regagner la hutte.
Messua exhorta son mari à marcher de l'avant, et l'obscurité se refermait sur eux et sur Mère Louve comme Bagheera se levait, presque sous les pieds de Mowgli, toute tremblante de délices à l'arrivée de la nuit qui rend le peuple des Jungles fou.
La grande Panthère sauta, comme saute un jeune chat pour attraper une feuille morte qui tournoie au-dessus de sa tête, frappa de droite et de gauche dans le vide, où l'air fouetté sonna, et elle retomba sans bruit sur ses pattes, pour ressauter de plus belle, tout en s'accompagnant d'un bruit, demi-ronron, demi-grondement, qui s'enflait de volume comme un ronflement de vapeur dans une chaudière.
Les mots humains arrêtèrent Bagheera court, ses hanches frissonnantes fléchies sous le poids de son corps, sa tête juste au niveau de celle de Mowgli. Une fois de plus Mowgli fixa son regard, comme il avait fait aux jeunes loups rebelles, en plein au fond des yeux de vert béryl, jusqu'à ce que la lueur rouge transparue derrière la prunelle verte s'éteignît comme le feu d'un phare qui s'éclipse à vingt milles en mer, jusqu'à ce que ces yeux s'abaissassent vers le sol, et avec eux, la grosse tête, plus bas, plus bas encore, et qu'une langue rouge vînt râper le cou-de-pied de Mowgli.
L'air autour d'un village hindou est naturellement plein de toutes sortes de senteurs, et, pour des créatures qui ne pensent guère que par le nez, les odeurs sont aussi affolantes que pour les êtres humains la musique et les breuvages. Mowgli caressa, quelques minutes encore, Bagheera, laquelle se coucha sur le sol, tel un chat devant l'âtre, les pattes repliées sous la poitrine et les yeux mi-clos.
Car il commençait à se sentir aussi téméraire que la Panthère qui se glissait dans la hutte.
Mowgli entendit les sangles craquer sous le poids de l'énorme bête.
Sous le pipal, à l'autre bout du village, la conférence était devenue de plus en plus bruyante. La séance fut levée parmi des hurlements sauvages, et un torrent d'hommes et de femmes roula dans la rue, brandissant des gourdins, des bambous, des faucilles, des couteaux. Buldeo et le Brahmane marchaient en tête, et la foule les serrait de près, en criant :
Une difficulté surgit devant le verrou de la porte : on l'avait solidement assujetti; mais la foule l'arracha d'une pièce, et la lumière des torches inonda la chambre où, étendu tout du long sur le lit, les pattes croisées pendant négligemment à l'un des bouts, noire comme l'abîme, et terrible comme un démon, attendait Bagheera.
Il y eut une demi-minute de silence désespéré, tandis que les premiers rangs de la foule, près du seuil, se taillaient à coups d'ongles un chemin en arrière; et, pendant cet instant, Bagheera leva la tête et bâilla avec minutie, recherche et ostentation comme elle avait coutume de bâiller pour insulter un égal. Les franges des lèvres se retroussèrent en s'écartant; la langue rouge se frisa; la mâchoire inférieure descendit, descendit tant, qu'on put voir à mi-chemin de la gorge fumante; et les formidables canines se découvrirent jusqu'au creux des gencives, avant de se refermer, celles du haut contre celles du bas, avec le bruit métallique de pênes d'acier rentrant dans leurs gâches sur les bords d'un coffre-fort. L'instant d'après, la rue était vide; Bagheera, d'un bond, avait repassé par la fenêtre, et se tenait aux côtés de Mowgli, tandis qu'un torrent d'hommes vociférants, hurlants, se grimpaient sur le dos et se passaient sur le corps, dans leur panique et leur hâte à regagner chacun sa hutte.
Le silence de la sieste semblait avoir surpris le village; mais, en écoutant, on pouvait entendre le bruit de lourds coffres à grain traînés sur la terre battue des maisons et qu'on poussait contre les portes. Bagheera avait dit vrai : le village ne bougerait plus jusqu'au jour. Mowgli restait assis, immobile, réfléchissant; et son visage, par degrés, devenait de plus en plus sombre.
Mowgli rentra dans la Jungle au pas de course, se laissa tomber en travers d'un rocher, et dormit tout le long du jour, et encore la nuit suivante.
Quand il s'éveilla, Bagheera était près de lui, et un chevreuil fraîchement tué gisait à ses pieds. La Panthère l'observa curieusement tout le temps qu'il travailla du couteau, mangea et but, pour se retourner enfin, le menton dans les mains.
Elle partit, laissant Mowgli en train de larder la terre avec son couteau, à coups furieux. Mowgli, de sa vie, n'avait vu de sang humain jusqu'à l'instant où il avait aperçu et ce qui lui disait bien plus senti le sang de Messua sur les liens dont on l'avait garrottée. Or, Messua avait été bonne pour lui et, autant qu'il pouvait savoir aimer, il aimait Messua aussi profondément qu'il haïssait le reste du genre humain. Mais quelle que fût son horreur des hommes, de leur bavardage, de leur cruauté et de leur couardise, il n'aurait pu, en échange de quoi que la Jungle lui pût offrir, se faire à l'idée de prendre une vie humaine, et sentir encore cette affreuse odeur de sang remonter à ses narines. Son plan se dessinait plus simple, mais avec plus d'ampleur; et il riait en pensant que c'était un des contes du vieux Buldeo, le soir, sous le pipal, qui lui en avait donné l'idée.
Hathi et ses trois fils étaient apparus, selon leur coutume, sans bruit. La vase de la rivière était encore humide à leurs flancs, et Hathi mâchait pensivement la tige verte d'un jeune bananier qu'il venait d'arracher avec ses défenses. Mais chaque ligne de son vaste corps montrait à Bagheera, qui savait voir les choses une fois le nez dessus, que ce n'était plus le Maître de la Jungle s'adressant à un Petit d'Homme mais un être effrayé d'avoir à comparaître devant un autre qui ne l'était pas. Ses trois fils roulaient côte à côte derrière leur père.
Mowgli leva à peine la tête lorsque Hathi lui souhaita « Bonne chasse ». Il le laissa se bercer, se balancer, lever un pied après l'autre pendant longtemps, avant de prendre la parole et, quand il ouvrit la bouche, ce fut pour s'adresser à Bagheera, et non aux éléphants.
Mowgli tendit le bras et, comme Hathi évoluait, une longue cicatrice blanche parut au clair de lune sur son flanc gris-ardoise, telle que l'aurait laissée un fouet d'acier brûlant.
Bagheera frémit et s'aplatit contre terre. Elle pouvait concevoir, si les choses en venaient au pire, une charge brusque dans la rue du village, des coups de droite et de gauche dans la foule, ou bien la ruse, l'homme qu'on abat, à sa charrue, au crépuscule; mais ce projet d'effacer de sang-froid un village tout entier de la vue des hommes et des bêtes l'épouvantait. Elle comprenait maintenant pourquoi Mowgli avait envoyé chercher Hathi. Hors l'Éléphant, avec ses longues années de vie, personne n'était en mesure de concerter et d'achever une telle guerre.
Mowgli eut à peine le temps de reprendre souffle il tremblait de la tête aux pieds de rage et de haine que déjà la place occupée par les Éléphants était vide. Bagheera le contemplait avec terreur.
L'idée de Bagheera dans le personnage d'un faon égaré bouleversa complètement Mowgli; il se mit à rire, reprit haleine, puis sanglota et rit encore, au point d'être obligé de sauter dans une mare pour s'arrêter. Alors il se mit à nager en rond, plongeant dans les rayons de lune pour ressortir dans l'ombre, comme la Grenouille, dont il portait le nom.
Pendant ce temps Hathi et ses trois fils s'étaient séparés dans la direction des quatre points cardinaux, et, un mille plus loin, descendaient les vallées à grands pas silencieux. Ils marchèrent, marchèrent deux jours durant cela faisait soixante bons milles de Jungle; et, pendant cette marche, chacun de leurs pas, chaque ondulation de leurs trompes, furent observés, notés et commentés par Mang, Chil, le Peuple Singe, et tous les oiseaux. Puis ils se mirent à brouter, et ils broutèrent tranquillement pendant une semaine à peu près. Hathi et ses fils ressemblent à Kaa, le Python de Rocher; ils ne se hâtent jamais qu'une fois le moment venu.
Au bout de ce temps la rumeur et personne ne sut d'où elle venait se répandit dans la Jungle qu'on pouvait trouver une nourriture et une eau bien meilleures dans telle et telle vallée. Les Sangliers, qui, naturellement, iraient au bout du monde pour un bon repas, se mirent en mouvement d'abord, par compagnies, en se bousculant sur les rochers; et les Cerfs suivirent, avec les petits Renards sauvages qui vivent des morts et des mourants que sèment les hardes; les nilghais trapus s'ébranlèrent en colonne parallèle aux cerfs, et les Buffles sauvages des marais vinrent derrière les nilghais. La moindre chose eût suffi à faire dévier les bandes éparses aux traînards innombrables qui paissaient, flânaient, buvaient et se remettaient à paître; mais, à chaque velléité d'alarme, quelqu'un surgissait pour les calmer. Une fois, c'était Ikki, le Porc-Épic, plein de nouvelles au sujet de bonnes choses à manger juste un peu plus loin; une autre fois, on voyait Mang battre de l'aile, avec des cris d'encouragement, en descendant une percée, pour montrer la voie libre; ou bien Baloo, la bouche pleine de racines, clopinait le long d'une colonne hésitante, et moitié menaçant, moitié batifolant, la remettait gauchement en bonne route. Un grand nombre de bêtes revinrent sur leurs pas, ou s'enfuirent, ou renoncèrent à continuer, mais il en resta beaucoup pour aller de l'avant. Dix jours environ plus tard la situation était celle-ci : les Cerfs, les Sangliers et les nilghais broyaient tout à la ronde sur un cercle de huit à dix milles de rayon, tandis que les Mangeurs de Chair escarmouchaient sur les bords. Et le centre du cercle était le village autour duquel mûrissaient les récoltes; et, parmi ces récoltes, se tenaient des hommes sur ce qu'ils appellent des machans plates-formes assez semblables à des perchoirs à pigeons, faites de bâtons portés par quatre piquets afin d'effaroucher les oiseaux et autres voleurs. Alors les Cerfs ne furent plus ménagés; les Mangeurs de Chair les serrèrent de près et les forcèrent à marcher toujours de l'avant et vers le centre.
Ce fut par une nuit noire que Hathi et ses trois fils se glissèrent hors de la Jungle et rompirent, au moyen de leurs trompes, les piquets des machans.
Ceux-ci tombèrent, brisés d'un coup, comme des tiges cassées de ciguë en fleur, tandis que les hommes précipités à terre entendaient tout contre leurs oreilles le gargouillement sourd des éléphants. Alors l'avant-garde des armées de cerfs effarés céda, se répandit dans les pâturages et les cultures du village, et les inonda; le sanglier fouisseur, au sabot tranchant, les accompagnait, et ce que le Cerf laissait debout il l'achevait. De temps en temps une alerte de loups ébranlait les hardes, qui se ruaient désespérément de tous côtés, foulant l'orge nouvelle, rasant les remblais des canaux d'irrigation. Avant l'aurore la pression sur le pourtour du cercle fléchit en un point. Les Mangeurs de Chair s'étaient repliés et laissaient du côté du sud un chemin ouvert par lequel fuyaient, bandes sur bandes, les Chevreuils. D'autres animaux, plus hardis, restaient en haut, dans les fourrés, pour finir leur repas la nuit suivante.
Mais l'ouvrage, en principe, était fait. Quand les villageois, au matin, regardèrent, ils virent leurs récoltes perdues. C'était pour eux la mort s'ils ne s'en allaient pas, car ils vivaient d'une année à l'autre aussi près de la famine que près d'eux la Jungle. Lorsqu'on envoya paître les Buffles, ces brutes affamées, en trouvant les pâturages rasés après le passage des Cerfs, s'égarèrent dans la Jungle et dérivèrent à la suite de leurs compagnons sauvages; et, à la tombée du crépuscule, les trois ou quatre bidets qui appartenaient au village gisaient morts dans leurs écuries, la tête fracassée. Bagheera, seule, était capable d'avoir ainsi frappé, et seule Bagheera eût osé l'insolence de traîner ainsi la dernière carcasse au milieu de la rue.
Les villageois n'eurent pas le coeur d'allumer des feux dans leurs champs, cette nuit-là; aussi Hathi et ses trois fils s'en furent-ils glanant parmi ce qui restait; et là où Hathi a glané, il est inutile de repasser. Les hommes décidèrent de vivre, jusqu'à la chute des Pluies, sur le blé réservé pour les semailles, quittes à chercher du travail comme domestiques avant de songer à rattraper cette année perdue; mais, au moment où le marchand de grains pensait à ses mannes de blé bien pleines, et supputait le prix qu'il en pourrait tirer, les défenses aiguës de Hathi entamaient le pignon de sa maison de terre, et mettaient en pièces le gros coffre d'osier, luté de bouse de vache, où reposait le blé précieux.
Lorsqu'on découvrit cette dernière perte, ce fut au tour du Brahmane de parler. Il avait invoqué ses propres Dieux sans recevoir de réponse. Il se pouvait, disait-il, qu'inconsciemment le village eût offensé quelqu'un des Dieux de la Jungle, car il n'y avait pas de doute que la Jungle fût contre eux. Aussi envoyèrent-ils chercher le chef des tribus les plus proches de Gonds Nomades petits chasseurs avisés à peau très noire qui vivent en pleine Jungle, et dont les aïeux descendent de la plus ancienne race de l'Inde les propriétaires aborigènes du sol. Ils accueillirent de leur mieux le Gond avec ce qui restait. Lui se tenait sur une jambe, son arc à la main, deux ou trois flèches empoisonnées passées dans la touffe de cheveux qui couronnait son crâne, avec un air mêlé d'effroi et de mépris, devant les villageois anxieux et leurs champs dévastés. Ils voulaient savoir si les Dieux les Anciens Dieux étaient irrités contre eux, et quels sacrifices il convenait de leur offrir. Le Gond ne dit rien, mais il ramassa un sarment de Karela, cette liane rampante qui porte le fruit amer de la courge sauvage, et l'enchevêtra en travers de la porte du temple, devant le visage de l'idole hindoue, peinte en rouge, qui ouvrait ses yeux fixes. Puis il fit de la main un signe dans l'espace, vers la route de Khanhiwara, et s'en retourna dans sa Jungle, suivant des yeux le peuple d'animaux qui dérivait au travers. Il savait que lorsque la Jungle bouge, seuls les hommes blancs peuvent espérer en détourner la marche.
Nul besoin de demander l'intention de son geste. La courge sauvage pousserait là où ils avaient adoré leur Dieu. Il ne leur restait qu'à se sauver, et le plus tôt serait le mieux.
Mais un village ne brise pas si facilement ses amarres. Ils demeurèrent encore tant qu'il resta quelques vivres d'été; ils essayèrent même de ramasser des noix dans la Jungle, mais des yeux ardents les épiaient, des ombres se mouvaient devant eux en plein midi, et lorsque, épouvantés, ils rentraient dans les murs en courant, au tronc des arbres près desquels ils avaient passé cinq minutes à peine auparavant, l'écorce pendait en lambeaux, déchiquetée par les griffes de quelque patte puissante. D'autre part, plus ils se confinaient dans le village, plus s'enhardissaient les créatures sauvages qui gambadaient et meuglaient sur les pâtis au bord de la Waingunga. Ils n'avaient pas le coeur de relever ni de replâtrer le mur extérieur de leurs étables vides, adossé à la Jungle; les Sangliers en achevèrent la ruine; les lianes aux racines noueuses se précipitèrent à leur suite, jetant leurs coudes avides sur la terre nouvellement conquise; et derrière les lianes l'herbe drue foisonna.
Ceux qui n'avaient pas de femmes s'enfuirent les premiers, portant auprès et au loin la nouvelle que le village était condamné. Qui pourrait, disaient-ils, lutter contre la Jungle ou les Dieux de la Jungle, quand le Cobra du village, lui-même, a quitté son trou sous la plate-forme, à l'ombre du pipal!
Le peu de commerce qu'ils avaient jamais entretenu avec le monde extérieur se réduisit au fur et à mesure que s'effaçaient les sentiers battus à travers la clairière. Enfin Hathi et ses trois fils cessèrent de les troubler la nuit par leurs éclats de trompette ils n'avaient plus rien à faire ici. La graine sous terre et la récolte au-dessus avaient également disparu. Les champs les plus éloignés perdaient déjà leur forme. Il était temps d'aller à Khanhiwara s'en remettre à la charité des Anglais.
Suivant la coutume des indigènes, ils différèrent encore le départ d'un jour à l'autre. Bientôt les Premières Pluies les surprirent, et les toits à l'abandon livrèrent passage au déluge; sur les pâturages l'eau montait à la cheville, et toutes les verdures se ruèrent, d'un élan, après les chaleurs de l'été. Alors ils sortirent dans la boue, hommes, femmes et enfants, à travers la chaude pluie aveuglante du matin, et ils se retournèrent, par un mouvement naturel, pour jeter un regard d'adieu sur leurs maisons.
Au moment où la dernière famille, ralentie par ses fardeaux, passait la barrière, on entendit derrière les murs un craquement de poutres et de chaume croulant. Un instant, dressée comme un reptile noir, une trompe polie apparut, qui éparpillait le chaume en bouillie; elle plongea et on entendit un nouveau craquement suivi d'un cri farouche. Hathi venait d'arracher les toits des huttes comme on cueille dans l'eau une touffe de nénuphars; mais une poutre, en rebondissant, l'avait piqué. Il n'avait besoin que de cela pour déchaîner toute sa force, car, de tous les hôtes de la Jungle, l'éléphant sauvage en fureur est le plus emporté dans ses destructions. Il culbuta d'une ruade un mur d'argile qui s'émietta sur le coup et fondit en boue jaune sous les torrents de pluie. Ensuite il vira, barrissant, se jeta dans les rues étroites, s'appuyant contre les huttes, à droite et à gauche, secouant les portes branlantes et les auvents rebroussés, tandis que ses trois fils faisaient rage derrière lui, comme naguère, au Sac des Champs de Bhurtpore.
Et Mowgli, la Pluie ruisselant sur ses épaules et ses bras nus, sauta d'un mur qui, pareil à un buffle fatigué, s'affaissait, cherchant son aplomb.
Tous quatre poussèrent côte à côte; le mur d'enceinte tomba, creva, s'effondra. Et les villageois, muets d'horreur, virent apparaître, dans les déchirures de la brèche, les têtes féroces, rayées d'argile, des dévastateurs. Alors ils s'enfuirent sans abri, sans pain, vers le bas de la vallée, tandis que leur village, haché, broyé, piétiné, s'évanouissait derrière eux.
Un mois plus tard un tertre onduleux, que recouvrait un manteau vert tendre de jeunes verdures, en marquait seul la place; et, à la fin des Pluies, le plein tonnerre de la Jungle vive grondait sur cette terre, que la charrue avait labourée six mois à peine auparavant.
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LA CHANSON DE MOWGLI CONTRE LES HOMMES Je lâcherai sur vous le prompt assaut des vignes, Les ais crouleront, les toits Vous couvrira tous! Aux portes de vos conseils mon peuple à moi chantera, Le serpent monte sa garde Rampe où vous aimiez! Vous ne verrez point mes coups, vous entendrez mon armée Le loup veille vos troupeaux Germe où vous aimiez! Car mes hordes avant vous auront gerbé vos moissons, Mettez les cerfs aux charrues Pousse où vous semiez! J'ai déchaîné sur vous les pieds noueux des vignes; Les poutres s'écrouleront Vous couvrira tous! |
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Mis à jour / révisé le 23-02-2009
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